A la cour d'Angleterre

Les Stuart devaient-ils régner sur l’Angleterre ?

Le 23 mars 1603, Elisabeth Ire, plus connue sous le nom de la « reine vierge », meurt à Londres, âgée de 69 ans. Son surnom de « reine vierge », elle le doit au fait de ne s’être jamais mariée, afin de rester toujours libre et de pouvoir gouverner seule.  Si elle a des amants et de nombreuses demandes en mariage, elle ne commet pas l’erreur de sa cousine, Marie Stuart, reine d’Ecosse, qui épouse Lord Darnley, né Henry Stewart, par amour… avant de se rendre compte qu’il n’inspire qu’à une seule chose : prendre le pouvoir et le pas sur sa royale épouse et souveraine.  Elisabeth n’a pas eu d’enfant et son plus proche parent n’est autre son neveu,  fils de Marie Stuart et de Lord Darnley :  Jacques VI, roi d’Ecosse depuis 1567.  Né le 19 juin 1566, le petit Jacques se retrouve bien vite orphelin. En effet son père, Lord Darnley, est assassiné le 10 février 1567. Avant la naissance de son fils, Henry Stewart ne s’entend déjà plus avec sa femme (il va jusqu’à faire assassiner son secrétaire particulier, Rizzio, alors que Marie est enceinte de six mois), et celle-ci souhaite se débarrasser d’un époux encombrant qui la terrorise. En s’enfuyant avec l’assassin de Lord Darnley,  le comte de Bothwell, Marie Stuart se condamne. Son fils lui est retiré et devient roi d’Ecosse le 24 juillet 1567, après que sa mère ait abdiqué en sa faveur. Il sera élevé dans la haine contre celle qui lui a donné le jour. 

Jacques VI enfant, par Arnold Bronckorst (1574)
Jacques VI enfant, par Arnold Bronckorst (1574)

En 1603, Jacques VI succède à la reine Elisabeth Ire, qui a fait exécuter sa mère à une époque où Marie Stuart était considérée comme une menace par sa cousine. Le roi d’Ecosse monte alors sur le trône d’Angleterre sous le nom de Jacques Ier. Il réunit ainsi le royaume d’Elisabeth Ire à celui de sa défunte mère. A cette époque, le souverain est déjà marié à la princesse Anne de Danemark et père de trois enfants : Henri Frédéric (né en 1594), Elisabeth (née en 1596) et Charles (né en 1600).  La dynastie des Stuart régnera désormais sur l’Angleterre jusqu’en 1714. Mais celle-ci était-elle bien légitime ?

En effet, en 1830, on découvre un squelette de nourrisson au château d’Edimbourg. Celui-ci est caché derrière une boiserie de l’appartement royal et enveloppé dans des langes marquées du monogramme des Stuart ! A qui donc appartient ce squelette ? Revenons en 1566 : Marie Stuart, qui a accouché il y a quelques mois,  est à Jedburgh. Elle est fort malade  – peut-être empoisonnée -, en proie à une fièvre qui la fait délirer et on la croit, à un moment, perdue.  La reine d’Ecosse remet alors officiellement son fils à noblesse. Jacques, encore au berceau, est le dernier héritier en ligne directe de la couronne d’Ecosse, ce qui fait de lui un enfant très précieux pour le royaume. Confié à sa gouvernante, la comtesse de Mar, il se trouve justement au château d’Edimbourg, tandis que sa mère agonise.  Peut-on imaginer que le petit Jacques décède brutalement là-bas ? Sa gouvernante, sur laquelle repose alors l’avenir de la dynastie des Stuart, aurait alors substitué son propre fils, âgé lui aussi de quelques mois, à l’héritier de la couronne d’Ecosse… et le petit corps aurait été dissimulé dans les murs du château. Miraculeusement, Marie Stuart se remet de sa maladie. Mais il aurait été trop tard pour avouer une quelconque substitution à la reine. Les partisans de cette version de l’histoire avancent d’ailleurs que Jacques Ier ne ressemblait guère à ses aïeuls : « On  se souvient du physique de Jacques, si différent de celui de ses ancêtres, de son caractère, plus différent encore, et l’absence de ses réactions filiales » (Philippe Erlanger). 
Jacques Ier et ses descendants (par Charles Turner, d'après Willem Van de Passe, 1814)
Jacques Ier et ses descendants (par Charles Turner, d’après Willem Van de Passe, 1814)

Quel crédit accorder à cette histoire, confiée par les descendants de la comtesse de Mar, à l’historien Jacques Chastenet ? On peut sourire de cette affaire lorsque l’on sait que l’Histoire regorge de prétendues substitutions, à l’exemple de celle du petit roi de France Jean Ier le Posthume. Mais si on admet que le petit squelette recouvert du monogramme des Stuart n’est pas le fils de la reine d’Ecosse, de qui s’agit-il et pourquoi avoir dissimuler son corps dans le château ? La réponse s’y trouverait toujours puisque, prévenu de la macabre découverte en 1830, le  roi William  IV de Hanovre  et son gouvernement auraient étouffé  l’affaire : « On se hâta de remettre ces restes à leur place et l’on essaya de ne pas ébruiter l’affaire, le gouvernement de Sa Majesté ayant donné des ordres impératifs » (Philippe Erlanger).  Il est vrai que William IV a pour ancêtre Jacques Ier… tout comme la souveraine actuelle. Comment, dans ce cas, oser remettre en cause la légitimité des quatre derniers siècles de règne de la famille royale britannique ?

Bibliographie :

Le Calendrier de l’histoire, par André Castelot
Histoire des Stuart, par Jean-Baptiste Coissac de Chavrebière
– Marie Stuart,  par Philippe Erlanger
 

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