Marie Touchet et la Saint-Barthelemy
On vous dira que le massacre de la Saint-Barthélemy était un règlement de compte entre les catholiques et les protestants ; que le bain de sang a eu lieu car la famille des ducs de Guise réclamait le trône de France ; que c’est Catherine de Médicis qui l’a prémédité en organisant le mariage de sa fille Marguerite avec Henri de Navarre. Tout cela est peut-être vrai, a sûrement pesé dans la balance. Mais qui oserait avouer qu’à l’origine de ce massacre il y a peut-être une femme ? Et pas n’importe laquelle. Non ce n’est pas une femme assoiffée de sang et sans cœur. Au contraire, c’est la « reine de cœur » du roi Charles IX : c’est la discrète et l’aimante Marie Touchet qui, sans le vouloir, serait l’élément déclencheur de la Saint-Barthélemy.
La maîtresse du roi est huguenote et, sachant que Charles l’aime aveuglement – bien qu’elle n’en profite pas – Marie encourage son amant à se rapprocher de l’Amiral Gaspard de Coligny, chef des protestants. Coligny bénéficie d’une grande faveur royale auprès du roi, qui voit en lui un second père. L’Amiral est traité comme s’il était un prince de sang, à la grande colère de Catherine de Médicis, qui déteste Coligny.
Au début de l’été 1572, Coligny propose à Charles IX de soutenir les flamands contre les espagnols et de faire la guerre à Philippe II d’Espagne. Catherine de Médicis désapprouve celui qui est soutenu par la maîtresse de son fils. Le 22 août, Coligny échappe à un attentat où il est tout de même blessé par un certain Charles Maurevert. Il se murmure alors que la reine-mère est cachée derrière tout cela, cherchant à se débarrasser de Coligny, qui influence trop, à son goût, Charles IX. Mais dés lors que cet assassinat est manqué, le bain de sang ne peut être évité. Catherine avoua-t-elle au roi qu’elle avait trempé dans l’attentat ? Le duc d’Anjou, futur Henri III, a probablement une part de responsabilité dans la tentative d’assassinat : l’arquebuse qui a blessé Gaspard de Coligny appartenait à un garde du corps du frère du roi. Ce qui est certain, c’est que Catherine de Médicis craint une vengeance de la part des protestants qui soutiennent Coligny.
Après l’attentat contre son ami, Charles IX aurait été victime d’une crise de nerfs, tandis que sa mère lui aurait soufflé que Coligny est un traître et doit mourir, ainsi que tous les chefs du parti huguenot. Le tempérament violent de Charles reprend le dessus et il se serait écrié : « Il faut les tuer tous afin qu’il n’en ait pas un seul pour me le reprocher un jour ! » A l’exception du roi de Navarre et du prince de Condé (qui auront le choix entre « Messe, mort ou Bastille ») tous les protestants présents dans Paris – et ils sont venus en masse pour le mariage d’Henri de Navarre avec la princesse Marguerite – sont assassinés. Parmi les premières victimes, on trouve Coligny. Ainsi dans la nuit du 24 août 1572, les catholiques massacrent les huguenots alors que la sœur du roi s’est mariée quatre jours plus tôt. Bien que Charles IX ait ordonné le massacre, il l’a fait à contre cœur. Après la tuerie, le roi demeure longtemps abattu et prostré, se sentant sans doute responsable de la mort de plusieurs milliers d’hommes, femmes et enfants protestants. Catherine de Médicis ne montrera aucun remord face à ce drame, niant toujours une quelconque implication de sa part. Selon Agrippa d’Aubigné, la reine-mère alla jusqu’à faire embaumer la tête de son ennemi Coligny et l’envoya au Pape ! Ainsi Marie Touchet, à l’origine de l’élévation de Coligny est, par cet acte, indirectement à l’origine du massacre de la Saint-Barthélemy.