Les portraits d’Elisabeth Ire : une propagande
L’image véhiculée du monarque lui sert de propagande. Cela est d’autant plus nécessaire lorsque le souverain est une femme. Ainsi, à partir de 1569, les portraits de la reine d’Angleterre Elisabeth Ire évoluent : à cette date, la « Reine Vierge » est âgée de 36 ans et, n’étant toujours pas mariée – elle ne le sera jamais -, elle a peu de chance de donner un héritier au trône d’Angleterre. De ce fait, Elisabeth doit consolider davantage son image de pouvoir et de puissance, à travers ses représentations.
Désormais, la reine porte toujours la couronne fermée d’Angleterre et se fait représenter dans des tenues sombres, tirant sur le noir. Elle porte de nombreux joyaux et nous montre un visage figé : La reine a un visage blanc, des lèvres très rouges, une perruque rousse ondulée et ornée de perles. Elisabeth Ire n’a jamais voulu se voir vieillir et passe chaque jour des heures à se faire mettre de la poudre et des crèmes sur le visage, pour le rendre blanc et cacher ses rides.
Deux styles différents selon l’âge de la souveraine :
Il s’agit également de valoriser, à travers les représentations d’Elisabeth Ire, son action politique : en 1588, le peintre George Gower représente la souveraine toute puissante face à la défaite de l’Invincible Armada espagnole (voir l’article Elisabeth Ire, reine mythique de l’Angleterre).
En 1588, Elisabeth Ire a 55 ans et l’absence d’un héritier trouble le peuple anglais. Celle qui pouvait revendiquer le trône, Marie Stuart, a été exécutée l’année précédente. C’est désormais le fils de cette dernière, Jacques VI d’Ecosse, qui est en première position dans l’ordre de succession. Cependant, Elisabeth Ire se refuse à régler la question de sa succession et les anglais craignent de nouveaux conflits. De plus, depuis trente ans, Elisabeth règne sur l’Angleterre et le peuple se lasse de la reine vieillissante. La souveraine choisie donc de se faire représenter avec un « masque de jeunesse » : un visage blanc et froid, impassible, qui impose le respect. Ainsi, Elisabeth Ire apparaît toujours jeune sur ses portraits, sans âge.
En 1599, alors que la souveraine est âgée de 66 ans, elle se fait représenter dans sa robe de couronnement – qui a eu lieu en 1559 -, coiffée de la couronne impériale, qui signifie qu’Elisabeth Ire se revendique comme étant « empereur dans son royaume ». Ce sentiment est renforcé par la présence du sceptre impérial qu’elle tient dans sa main droite. Sa main gauche est posée sur un globe, geste de possession et de domination protectrice : l’Angleterre apparaît donc comme étant une grande puissance sur laquelle règne une souveraine bienveillante. Ce portrait « du couronnement » est une icône idolâtre destinée a renforcer l’admiration que voue le peuple anglais à sa souveraine, ainsi que le « culte d’Elisabeth » qui renvoie à une image mythique de cette reine pour l’Histoire.
Pour en savoir plus : « Le pouvoir contesté : Souveraines d’Europe à la Renaissance » de Thierry Wanegffelen