Renaissance : Quand les femmes gouvernaient le monde
Ce mois-ci, le magazine Historia vous propose un numéro spécial, afin de découvrir quinze figures féminines d’exception, qui ont tenu les rennes du pouvoir dans un monde souvent hostile.
Dans une Europe gouvernée par les hommes, le premier devoir d’une princesse est de procréer, afin de transmettre le pouvoir de son époux à un héritier. Pour le reste, on attend qu’elle se cantonne à un rôle de figuration. Pourtant, dans un monde politique à dominance masculine, certaines femmes se distinguent pour avoir eu le pouvoir royal en mains. L’exercer n’est pas facile car les envieux sont nombreux, et les femmes souvent jugées inaptes à gouverner. Ainsi, Louis XI qualifie sa fille, Anne de Beaujeu, de « femme la moins folle de France, car de sage il n’en est point » lorsqu’il lui confie la régence…
C’est souvent en cas d’absence – ou de minorité – du roi, que la mère de celui-ci accède au pouvoir. Le cas de Louise de Savoie, mère de François Ier, inspirera les futures régentes de France. Souvent qualifiée de « reine-mère » alors qu’elle n’a jamais régné, Louise de Savoie marquera l’Histoire par l’influence qu’elle exerce sur son fils, jusqu’à reléguer dans l’ombre l’épouse légitime du souverain. Eclipsant également trois reines successives, épouses de ses fils, Catherine de Médicis s’empare du pouvoir à la mort de son époux. Elle ne le quittera plus. Souvent malmenée par l’Histoire, Catherine guide et conseille les derniers rois Valois, jusqu’à son dernier souffle. Elle est restée, pour la postérité, « le seul homme de la famille ».
Si la loi salique ne permet pas aux femmes de ceindre la couronne en France, elles peuvent accéder au trône, en l’absence d’un héritier mâle, dans les autres pays d’Europe. En Angleterre, le conflit qui oppose Elisabeth Ire à sa cousine Marie Stuart marquera l’Histoire. Entourées d’hommes qui rêvent de pouvoir et fomentent des complots, les reines rivales s’engagent dans une bataille sans merci. Désirant conserver son pouvoir jusqu’au bout, Elisabeth Ire fera le choix du célibat, renonçant à engendrer un héritier, afin de ne jamais avoir à partager le trône…quitte à faire disparaître, avec elle, la dynastie des Tudor.
Certaines femmes accèdent au pouvoir par un coup du sort, qui prive le trône d’un prince. Ainsi, Elisabeth Ire succède à un frère et une sœur morts sans descendance. Quant à Jeanne « la folle », elle hérite des couronnes de Castille et d’Aragon suite aux décès successifs de son frère aîné et de son neveu. Si Jeanne est restée dans les mémoires à cause de sa raison vacillante, elle n’en demeure pas moins la mère de Charles Quint et de cinq autres têtes couronnées d’Europe.
Instruments politiques dès leur naissance, les princesses sont des pions sur l’échiquier européen et leur destin bascule au gré des alliances et des guerres. Ainsi, Marie Stuart est d’abord fiancée à Edward VI d’Angleterre…avant de s’enfuir épouser le futur roi de France ; Anne de Bretagne voit son premier mariage cassé afin d’être unie à Charles VIII…avec l’obligation de convoler avec son successeur si aucun héritier ne naît de leur union.
Si les hommes font la guerre, les femmes ont tendance à prôner la paix. La Renaissance est marquée par l’affrontement sans fin que se livrent François Ier et Charles Quint. Si l’Europe connaît des moments d’apaisement, n’est-ce pas grâce à la « paix des Dames » que l’on doit à Louise de Savoie et Marguerite d’Autriche ? De même, Catherine de Médicis et Jeanne d’Albret uniront leurs enfants – Marguerite de Valois et Henri de Navarre – dans le but de réconcilier catholiques et protestants.
Pour ces femmes de caractère qui ont gouverné, le plus difficile ne fut pas d’accéder au pouvoir, mais bien de le converser et de le transmettre, intact voire renforcé, à leur successeur.
spécial N°40 / mars-avril 2018
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