Ramsès II : le pharaon superstar
Le magazine Historia consacre un numéro spécial à Ramsès II, l’un de plus célèbres pharaons d’Egypte. Si Toutankhamon est entré dans l’Histoire grâce à la découverte de son tombeau demeuré intacte, Ramsès II se taille son titre du « roi des rois » de son vivant, de par les monuments qu’il fait élever à sa gloire et l’image de grand guerrier conquérant qu’il entretient. Mais c’est surtout pour s’être fait diviniser de son vivant, après quelques années de règne, que Ramsès entre dans la légende, devenant l’égal des dieux…
Lorsque le futur Ramsès II vient au monde, vers 1304 avant J.C, sa famille ne règne pas encore sur l’Egypte. Après la mort du jeune Toutankhamon, pharaon de la XVIIIe dynastie, le pouvoir passe dans différentes mains, jusqu’à être détenu par Horemheb, un militaire d’origine noble. Ce pharaon n’ayant pas d’enfant à qui laisser le trône, il nomme son vizir, Paramessou, co-régent, afin d’en faire son héritier. A la mort d’Horemheb, une nouvelle dynastie se place sur le trône d’Egypte et Paramessou prend le nom de Ramsès Ier. Ce pharaon n’a pas été couronné de par sa filiation mais grâce à une nomination de son prédécesseur, ce qui rend sa légitimité fragile. Lui succèdent rapidement son fils puis son petit-fils, Séthi Ier et Ramsès II. Lorsque ce dernier accède au pouvoir, il cherche de suite à asseoir sa légitimité, sa famille étant depuis peu de temps à la tête du royaume.
Les pharaons étant censés descendre des dieux par Horus, Ramsès II s’emploie très vite à honorer « ses ancêtres », lors de fêtes et de cérémonies, imitant ainsi d’autres pharaons ; une manière de se rattacher à la précédente et prestigieuse dynastie qui a régné près de trois siècles sur l’Egypte. Mais Ramsès II va encore plus loin en se divinisant de son vivant, avant d’avoir atteint ses dix ans de règne. Son autorité sur le peuple égyptien ne peut plus, dès lors, être contestée. Découvrez les rituels du culte divin auquel le pharaon doit se conformer, à l’exemple de la cérémonie de « l’Eveil du dieu », et auxquels participe bientôt Nefertary, « l’épouse du dieu ».
Mariée à Ramsès II avant son accession au trône, Nefertary est la « grande épouse royale », le pharaon ayant contracté plusieurs unions – parfois avec ses propres filles – au cours de sa longue vie (estimée à 80 ans). Très tôt associée au pouvoir, Nefertary est souvent mise à l’honneur, à travers de multiples représentations, aux côtés de Ramsès II. Mais la reine ne fait pas que de la figuration et joue un rôle politique, en s’impliquant dans les échanges diplomatiques. Explorez le tombeau de Nefertary, qui rend hommage à l’épouse favorite du pharaon. Restaurée et ouverte au public, la dernière demeure de la reine témoigne du faste déployé sous le règne de Ramsès II.
Le pharaon se forge très vite une réputation de « roi bâtisseur », en agrandissant, rénovant et construisant des temples et sanctuaires, en prenant bien soin de laisser une trace : statues, colonnes, cartouches… les manifestations de la présence et de l’œuvre de Ramsès II sont présentes dans de nombreux sites en Egypte. Partez à la découverte de ces lieux, où le « roi bâtisseur » à laisser son empreinte… quitte à effacer celles de ses prédécesseurs, pour glorifier encore un peu plus sa propre dynastie.
Ramsès II veut être immortalisé comme étant un grand chef de guerre. Aussi, le pharaon se met souvent en scène, en guerrier victorieux, quitte à prendre des libertés avec l’Histoire, afin de mieux servir sa propagande royale, à l’exemple de la bataille de Qadesh : découvrez les dessous de cette demi-défaite, que Ramsès II transforme en triomphe à son avantage ! Le pharaon fait également représenter ses fils, combattant à ses côtés, même lorsque ceux-ci sont encore trop jeunes pour participer à une campagne, et donc tenus bien loin des champs de batailles. Une manière, pour Ramsès II, d’affermir la légitimité de ses enfants à lui succéder.
La légende de Ramsès II s’est surtout construite autour de deux grands axes. Le premier est la découverte, suivie de la restauration, de sa momie. Comme de nombreuses tombes pharaoniques, celle de Ramsès II est pillée et sa momie déplacée, afin d’être mise à l’abri. Découverte au XIXe siècle, la momie du « roi des rois » subit les ravages du temps et de l’exposition à l’air libre. En 1976, le pharaon est transporté à Paris afin d’être étudié et de retrouver une « seconde jeunesse », avant de pouvoir à nouveau être exposé au musée du Caire. A cette occasion, les photographies de la momie de Ramsès II vont faire naître une fascination du grand public pour ce pharaon mythique.
Autre fait qui contribue à perpétuer le souvenir de Ramsès II : de nombreux savants sont persuadés qu’il est le pharaon de l’Exode, que Moïse aurait défié afin de libérer le peuple hébreux. Sur quoi les historiens se basent-ils pour affirmer – ou non – que Ramsès II est le roi d’Egypte évoqué dans l’Ancien Testament ?
Le long règne de Ramsès II – soixante-six ans – lui a permis de laisser un grand nombre de traces dans toute l’Egypte, et de se construire une image de pharaon divin, à travers une propagande et des mises en scène, notamment lors des jubilés. Ramsès II a également « réussi » à faire vivre son souvenir trois milles ans après sa mort, grâce à sa momie et aux médias (le pharaon reprend vie dans le film « Les Dix Commandement » en 1976). Mais sans doute ne s’imaginait-il pas que son nom glorieux serait un jour associé à des jeux de société, des parfums ou des cigarettes…
spécial N°55 / septembre-octobre 2020