L’accession au trône et le mariage de la reine Victoria
Cet article a été rédigé par Magalie Manzi, passionnée par l’Histoire de l’Angleterre.
Victoria Ire voit le jour le 24 mai 1819 en Angleterre, plus précisément à Kensington Palace. Elle est la fille unique d’Edward Auguste, duc de Kent, et de Victoire Marie Louise de Saxe-Cobourg.
Ses parents se sont mariés en 1818, par nécessité. En effet, le duc de Kent avait une maîtresse de longue date (qui n’était pas de sang royal) et il fallait offrir un héritier au royaume. Depuis la mort de la princesse Charlotte, héritière du la couronne, en 1817, les fils de George III se sont lancés dans la course au trône. Tous se marient, espérant maintenir la descendance des Hanovre. Edward Auguste, le duc de Kent, est le seul à donner une héritière qui survit à la petite enfance, ses frères demeurant sans descendance ou ayant des enfants morts en bas âge.
L’héritière tant désirée est la princesse Victoria (de son prénom de baptême Alexandrina Georgina Victoria). Tout pourrait être pour le mieux, mais le sort s’acharne sur la famille des Hanovre. Le duc de Kent est repoussé par toute sa famille : par son père mais surtout par son frère, le futur George IV. Le mépris de George IV à l’égard du duc de Kent est peut-être lié à la jalousie que l’aîné porte à son cadet qui vient d’épouser une princesse étrangère, une Saxe-Cobourg. Peut-être digère-t-il également très mal le fait que la petite Victoria puisse devenir reine, quand le trône devait revenir à sa défunte fille, Charlotte. Le couple de Kent est surendetté et le duc meurt brusquement d’une pneumonie en 1820, laissant une petite fille qui n’a que quelques mois.
Victoria sera éduquée par sa mère et un « ami » de celle-ci, John Conroy. La princesse sera tenue à l’écart de la famille royale, à cause notamment de la discorde entre sa mère et George IV puis Guillaume IV. Cela n’empêchera pas les deux rois d’insister pour voir leur nièce. Guillaume IV, roi d’Angleterre de 1830 à 1837, fera de son mieux pour éviter une régence de la duchesse de Kent. Il est vrai que la duchesse est très influencée par Conroy (son frère Léopold Ier de Belgique, le docteur Stockma et le roi en sont pertinemment convaincus). La princesse Victoria mènera une enfance malheureuse, loin de la cour et recluse dans un palais.
Le roi Guillaume IV meurt en 1837. Victoria, âgée de 18 ans, devient reine. Lord Melbourne l’épaulera dès le premier jour en lui prodiguant de bons conseils. Il tiendra une place importante aux yeux de la reine. Elle chassera Sir John Conroy de chez elle dès le début de son règne mais gardera sa mère à ses côtés.
Après son couronnement, le 28 juin 1838, les personnes proches de la reine (notamment Lord Melbourne et son oncle Léopold Ier) commencent à évoquer le prochain mariage de Victoria. Le roi des Belges, Léopold Ier, a le profond désir – depuis des années – d’unir sa nièce à son neveu, le prince Albert de Saxe-Cobourg (né le 26 août 1819). Ce serait là une bonne union pour les deux pays. La principale concernée est contre l’idée car elle ne désire pas se marier. On lui a déjà présenté de nombreux prétendants mais rien n’y fait. Quant à Albert, il n’est pas au goût de Victoria.
Cependant, la reine accepte la venue de ses deux cousins de Saxe-Cobourg au palais, Ernest et Albert, en 1836. Victoria et Albert correspondent durant plusieurs mois. Le jour où la jeune reine revoit ses cousins, en 1839, Victoria réalise qu’elle a de forts sentiments pour Albert. Après en avoir avisé Lord Melbourne, elle décide de demander le prince en mariage, qui répond favorablement. Les noces se déroulent le 10 février 1840 en Angleterre, à Westminster. Victoria tombe très vite enceinte et le 21 novembre 1840 à Windsor, naît son premier enfant, la princesse royale Victoria Adélaïde, qui mourra quelques mois après sa mère, en 1901. Par la suite, le couple royal aura huit autres enfants :
– Edward VII (1841 – 1910)
– Alice (1843 -1878)
– Alfred, duc de d’Edimbourg (1844- 1900)
– Hélène (1846- 1923)
– Louise (1848- 1939)
– Arthur, duc de Connaught (1850- 1942)
– Léopold, duc d’Albany (1853 – 1884)
– Béatrice (1857 – 1944)
Le prince Albert, ne pouvant être roi, est nommé « prince consort » sous la pression de Victoria : en cas de décès de la reine, Albert peut éventuellement prendre la tête de la régence. A partir de là, Victoria confie certaines missions à son époux, comme la Grande Exposition Universelle du 1er mai 1851 au Crystal Palace de Londres, un événement grandiose pour l’époque. Le prince Albert est un précurseur dans certains domaines tels que l’économie du royaume.
Le 14 décembre 1861 sonne le glas du bonheur pour le couple si soudé : Albert meurt de la typhoïde à 42 ans. Victoria ne se remettra pas de la perte de son époux, restant cloîtrée au palais et limitant ses sorties publiques. En hommage au prince consort, elle fera édifier des monuments à la gloire de son mari, ce qu’on lui reprochera.
Reine d’Angleterre de 1837 à 1901, impératrice des Indes à partir de 1877, Victoria gouverne un empire d’une puissance et d’une étendue inégalée. Elle laissera une ère qui prendra son nom : « l’ère victorienne ».
À cette époque, alors que l’Europe est en proie aux convulsions et que la France s’épuise à changer de régimes politiques, les anglais, pragmatiques conservent la monarchie en lui ôtant tout pouvoir de nuisance, et bâtissent une démocratie parlementaire qui reste exemplaire. Bien que de tempérament capricieux et autoritaire, Victoria fut convaincue par son mari que la royauté devait s’appuyer sur les classes moyennes entreprenantes, accompagner l’évolution démocratique et non la freiner. Elle aura plusieurs premiers ministres, entre autre Lord Melbourne, John Russell, Lord Derby, Disraeli et Robert Peel.
La reine Victoria, adorée au même niveau qu’Elisabeth Ire, décède le mardi 22 janvier 1901. Depuis cinq jours elle était frappée de paralysie et ne pouvait plus parler. Victoria aura régné près de soixante-quatre ans. Elle aura survécu à Albert quarante ans et est inhumée à ses côtés dans un mausolée qu’elle avait fait faire bâtir pour lui. Sur ce mausolée on peut lire : « Adieu, très aimé. Ici, je demeurerai avec toi, Et avec toi, dans le Christ, je ressusciterai ».