France et Moyen-Orient depuis 1945

Le magazine Historia consacre son mensuel aux relations entre la France et le Moyen-Orient, depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Si les échanges sont alors cordiaux, les événements qui s’enchaînent au cours des décennies suivantes redistribuent les cartes.

La présence de la France au Moyen-Orient remonte au Moyen-Age, au temps des croisades. Au XVIe siècle, le roi François Ier scelle une alliance avec l’empereur ottoman, Soliman le Magnifique. Au fil des siècles, les échanges avec l’Orient se multiplient et, en 1919, Clemenceau obtient un mandant français en Syrie et au Liban, suite aux accords de Versailles. Durant son administration, le gouvernement français souhaite se développer militairement et culturellement dans ces pays, mais s’affiche également comme étant le protecteur des chrétiens d’Orient, ce que les musulmans – majoritaires – acceptent mal : depuis que la Syrie a proclamé son indépendance en avril 1946, les relations avec la France sont « en dents de scie », malgré les échanges commerciaux  (pétrole, automobiles…).

Depuis la création de l’État d’Israël en 1948, la France joue les équilibristes au Proche et au Moyen-Orient, avec pour objectif de promouvoir la paix, tout en préservant ses propres intérêts : la nationalisation du canal de Suez, en 1956, voit naître des avantages communs pour la France et l’Israël. S’ils sont économiques pour les français, les israéliens voient là une opportunité d’engager une coopération nucléaire avec la France, pour garantir leur pérennité…

Le Liban, indépendant depuis 1943, garde de bonnes relations avec la France, multipliant les échanges économiques et culturels. A la différence de la Syrie, le Liban conserve la pratique de la langue française et met en place des bourses permettant aux étudiants libanais d’étudier dans des universités en France, ou de sortir de l’université de Beyrouth avec un diplôme reconnu sur le territoire français.

Si le gouvernement français a toujours soutenu l’idée d’un État palestinien à côté de l’Israël, il est impuissant face aux conflits qui se multiplient depuis les années 1960. En juin 1967, l’Israël doit faire face à la coalition de quatre pays arabes : l’Égypte, la Jordanie, la Syrie et l’Irak. Au lendemain de la « guerre de six jours », qui se solde par une victoire éclair de l’Israël (grâce aux armes fournies par la France), les relations entre le pays vainqueur et le président Charles de Gaulle sont passablement refroidies, dès lors qu’il apparaît que le gouvernement israélien cherche à s’éloigner progressivement de son allié français. Depuis cette date, la grande majorité des armements israéliens provient des États-Unis, qui prend de plus en plus de place, alors que la France perd de son influence.

Si les relations entre la France et l’Iran étaient à leur apogée après la Seconde Guerre Mondiale, elle sont beaucoup moins bonnes depuis la révolution islamiste de 1979. De la confiance avec l’Iran, la France glisse progressivement vers la méfiance, notamment sur la question du nucléaire, tandis que les États-Unis gagnent du terrain.

La montée des tensions au Moyen-Orient provoque une diminution des échanges commerciaux avec la France. Bien que celle-ci ait toujours eu comme objectif de résoudre les conflits et de dénoncer les injustices (tensions religieuses, politiques et militaires), il faut admettre que la France a aujourd’hui bien du mal à se faire entendre, face au géant américain.

Les massacres du 7 octobre 2023 perpétrés par le Hamas en Israël, et les représailles qui suivent, montrent les limites de la France : si elle se veut protectrice des chrétiens d’Orient, elle reste impuissante face aux tensions qui perdurent entre le Liban et l’Israël, et aux conflits armés qui se multiplient. Le Moyen-Orient semble être devenu une poudrière, bien éloigné de l’idée de paix que la France voulait y instaurer.