Les enfants illégitimes de Louis XIV

02.Marie-Anne, Mademoiselle de Blois

Le 2 octobre 1666, tandis que la cour se rend à la messe, la maîtresse de Louis XIV, Louise de la Vallière, accouche secrètement d’une fillette que le roi prénommera Marie-Anne. Légitimée en 1667, l’enfant reçoit le titre de Mademoiselle de Blois.  Marie-Anne passe généralement pour être la fille préférée du Roi-Soleil… peut-être parce qu’elle a hérité de la beauté de sa mère. A l’âge de 7 ans, la petite princesse passe déjà pour être « un prodige d’agrément et de grâce ». En 1674, Mademoiselle de Blois voit sa mère prendre le voile au Carmel. Elle se retrouve seule à la cour, avec son jeune frère, le comte de Vermandois. Marie-Anne restera en contact avec celle qui est devenue Sœur Louise de la Miséricorde, à qui elle rend visite fréquemment. Le roi désire marier sa fille à un prince de sang et, le 16 janvier 1680, Mademoiselle de Blois épouse le prince Louis-Armand Ier de Bourbon-Conti.

Mademoiselle de Blois, par François de Troy (vers 1680)
Mademoiselle de Blois, par François de Troy (vers 1680)

Le mariage est l’occasion de grandes festivités mais la nuit de noces est restée dans l’histoire comme étant une catastrophe : le prince de Conti se montre trop brutal et effraie sa jeune épouse,  qui  – de plus – vient d’avoir ce qu’on appelle alors « ses époques » (ses menstruations). Épouvanté devant ce spectacle, Louis-Armand quitte la chambre, criant qu’il ne partagera plus jamais son lit avec sa femme. Il n’est pas certain que le prince s’éloigna pour de bon du lit conjugal mais le mariage restera stérile. Le prince de Conti a la réputation d’être libertin et délaisse bien vite son épouse. Celle-ci est d’ailleurs attirée par son beau-frère, François-Louis de Bourbon-Conti, qui serait devenu son amant. En 1683, la princesse perd son jeune frère, le comte de Vermandois, qui était tombé en disgrâce auprès du roi. Marie-Anne est l’une des rares personnes à pleurer le décès du comte.  En 1685, la princesse de Conti attrape la petite vérole. Si elle en réchappe, Louis-Armand, qui a décidé de rester au chevet de son épouse, contracte la maladie et  meurt le 9 novembre. Ravie d’être libérée de l’autorité d’un époux, la jolie veuve goûte désormais aux plaisirs du célibat et ne se remariera pas. A la mort de Louis-Armand Ier, c’est son frère cadet, François-Louis, qui  hérite du titre de premier prince de Conti et son épouse, Marie-Thérèse de Bourbon-Condé, devient, par conséquent, princesse de Conti. Marie-Anne est désormais princesse douairière de Conti et sera appelée la « Grande princesse de Conti » pour la différencier de sa belle-sœur. 

Très proche de son demi-frère, le Grand Dauphin, Marie-Anne est en guerre ouverte avec ses demi-sœurs naturelles,  les duchesses de Bourbon et d’Orléans, filles du roi et de Mme de Montespan. Les filles légitimées de Louis XIV recherchent chacune à avoir le plus de prestige et les plus grands honneurs à la cour. Entre elles, naît très vite une rivalité, d’autant que François-Louis de Bourbon-Conti devient bientôt l’amant de la duchesse de Bourbon.  Alors que le dauphin s’ennuie auprès de son épouse, Marie-Anne-Christine de Bavière, la Grande princesse de Conti lui présente l’une de ses filles d’honneur, Emilie de Joly de Choin, que l’héritier du trône épousera secrètement en 1695, après la mort de la dauphine. Depuis le mariage du duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XIV, avec Marie-Adélaïde de Savoie, Marie-Anne ne jouit plus de la même faveur auprès du roi, lequel passe beaucoup de temps avec la princesse de Savoie. Délaissée, la fille légitimée de Louis XIV voue alors une terrible jalousie à la jeune duchesse de Bourgogne. 

La princesse de Conti, par François de Troy (1680)
La princesse de Conti, par François de Troy (1680)

Le 6 juin 1710, Marie-Anne perd sa mère, qui a passé trente-six années au Carmel. La princesse devient alors duchesse de la Vallière, ayant hérité du duché de sa mère. Elle porte le deuil, s’attirant les foudres de ses demi-sœurs légitimées. En effet, les filles de Mme de Montespan étant nées d’un double adultère, elles n’ont pu prendre officiellement le deuil de leur mère, décédée en 1707.  Alors qu’elle est très proche de l’héritier de la couronne, la Grande princesse de Conti voit ses rêves s’effondrer lorsque le dauphin décède  brutalement, 14 avril 1711, de la variole. Jusqu’au bout, Marie-Anne brave le risque de contagion en soignant son demi-frère, empêchant le roi d’entrer dans la chambre du malade. 

En 1713, la Grande princesse de Conti achète l’hôtel de Lorges, à Paris, où elle se retire après la mort du roi, en septembre 1715. En 1716, Marie-Anne fait acquisition du château de Choisy, puis du château de Champs-sur-Marne, en 1718. Elle le lègue aussitôt à son neveu, le chevalier de la Vallière (fils de son oncle, Jean-François de La Baume Le Blanc). Connaissant très bien l’étiquette qui régit la cour de France, la Grande princesse de Conti se voit confier l’éducation de l’infante d’Espagne, Marie-Anne-Victoire, fiancée de Louis XV, en 1721. Après la rupture des fiançailles du roi, en 1725, Marie-Anne de Bourbon quitte la cour pour s’installer dans ses propriétés. Elle décède à Paris le 3 mai 1739, victime d’une tumeur au cerveau. 

Bibliographie

Les reines de France au temps des Bourbons : les Femmes du Roi-Soleil, par Simone Bertière
 Les bâtards du Soleil, par Eve de Castro
– Louise de la Vallière, par Jean-Christian Petitfils

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